In  Vous…murmure-t-il 

Il me dit vous en me branlant le con, gentiment, sans passion. Vous avez un corps superbe, je veux dire, pour votre âge. Il a, lui, la peau charpentée et tendre, laiteuse au ventre, une peau de blond qui doit éclater au premier soleil, il a juste ce qu’il faut de poils aux poignets et sur les phalanges pour me faire craquer. Déshabillez-vous, a-t-il enjoint, que je vous masse les reins, déshabillez-moi, ai-je quémandé en enlevant finalement moi-même tout élément superflu au dit massage.

Apparemment, nous n’avons pas les mêmes notions d’anatomie mais c’est agréable, il dit laissez-vous aller, je ne prendrai de plaisir que si vous prenez le vôtre, il est attentif et doux, il invente juste ce qu’il faut dans l’exploration pour éviter le piétinement, mes sens sont paisibles, il est courtois et cultivé, sensuel, laissez-vous […]

 

 

f  f f  f   

 

 

In Dieu bénisse les secretaires !

[…] Les Eminents passent, pléniventripotentiaires, incomplets sombres cravatés, suivis des traducteurs en bulles de chewing-gum, les chauffeurs poursuivent leur propre regard indifférent à travers les trous des serrures des limousines. Voici que nous approchons maintenant de l’Alligator Gai, voici que nous sommes arrivés à l’Alligator Gai. Entrent les Eminents, je vous rends l’antenne, à vous les studios !

Suivent les secrétaires. Restent dehors les chauffeurs à casquettes, condamnés à manger des sandwiches, jabotant pour la foule. Les journalistes courent en tous sens pour saisir des miettes. Effets de plume, effets de glotte, ce sont les chauffeurs des voitures officielles qui font la chronique.

 

Les Eminents maintenant assis parlent et mangent et se sentent bien dans leur assiette. Le cristal des verres siffle, et cliquettent les couverts. Quelques boutons de chemises discrètement craquent, qui de cou, qui de bedaine. Vestons tombés, narine pincée. Les traducteurs traduisent bien ce qu’ils peuvent.

Dehors la foule : …et ron… et ron...

Dedans, le débat enfle, brûle et bourdonne de munster vineux, d’haleine violacée, de sueur politique. Otto Färsen lance, une dent tapie dans une salmonelle onctueuse AOC, qu’il schlagt vor English für die technischen und moralischen Bereiche zu gebrauchen et le Krec für die traditziones, Italienisch oder Deutsch für letz arts et die Musik, et le Frantzais für la tzentzualité. Bref, que ce pourrait être trôlatique, ya no ? de pronontzer..., si ? P. Magee rétorque, Bengt Schütte, Pays-Bas, pense quant à lui, JPA Petit insiste, le Danois déglutit, l’Italien glousse, et Bengt Schütte abuse.

 

Edith la secrétaire est pensive : rien n’a de sens, dans ces débats. En parlant d’ébats, bref, ce soir il faut absolument qu’elle trouve le moyen de coucher avec son mec. Ce matin, pour la première fois, il lui a mis la main au bon endroit. Cela l’autorise-t-elle à concrétiser ? Et, virevoltante and nice, she wants to take a walk on the wild side and she says doo, doo doo, doo doo doo doo...[…]

 

 

 

f  f f  f   

 

 

 In Un homme à toiles

 Il flotte et rature, frôle et conjure. Il bégaie et révèle, il respire. Il effiloche et couche l’huile, il éprouve. Tâtonne du bout des doigts. Eperdu, il se trouve. Son souffle rauque colle à la toile et secoue le néant. Mise en chair, par son souffle seul.

A courbes floues, demi enfouies, naît peu à peu le bas d’un dos. Adam se penche, s’agenouille et regarde. Regarde.

Puis se précipite. Etale la couleur de ses lèvres, précise les contours à grandes coulées enragées, leur insuffle la vie. Sa joue se fait pesante en remontant sur les hanches, en peaufine le grain jusqu’à ce qu’il devienne dur et mobile, obsède les reins jusqu’à ce qu’ils en vibrent, jusqu’à la transparence. D’un doigt ferme Adam repousse la croûte de plâtre sombre, inutile stigmate d’un ancien chaos, se fraie un chemin, les lèvres toujours pressées sur la peinture, esquisse une taille. Il y modèle des plis, sculpte et galbe d’autres replis plus flous pour y perdre sa langue, s’attarde, mord la couleur. Ses mains exigent et brusquent, glissent, palette tableau, toile pigments, de ce corps à son rêve. Ses mains rêches façonnent, soupèsent, rehaussent, caressent deux petits seins fermes à peine bombés, à peine tachés de brun rosé. Adam retouche au frisson le creux d’une aisselle, l’accuse d’un baiser, et se laisse envahir là par le parfum d’huile et de sueur mêlées.

– Ma belle, ma toute belle...

Eternité.

Puis se relève, fervent, de ses paumes jointes en creuset, ovalise un visage, hésitant et haut de front, se met à parler bas dans la demi-lumière.

Et moi, la tache fragile et blanche, j’écoute, troublée, mon peintre murmurer. Les mots câlinent, les mots s’égrènent lentement contre mon cou, me travaillent au corps, les mots m’étreignent, chaleur de ta bouche, Adam, oh ! ta bouche avide et soyeuse ! Que veux-tu donc de moi, homme qui me contemple ? Je suis ton œuvre, sortie toute droite de ton mensonge. Me veux-tu vraiment ? Je te viens, me reconnaîtras-tu cette fois, enfin ? Ou bien ne serai-je encore qu’une de tes ébauches de crayon, qu’une suite de courbes maladroites ? Adam qui tant me cherche depuis tant de temps ! Suis-je enfin conforme à ton désir ? Devrai-je […]

 

 

 

                      f  f f  f   

 

 

 

In L'andouillette de loup millefleurs 

 […] On n’eût pu dire qui avait ouvert le feu, pas un mot d’explication. Peste en leur ménage, hypocrisie et rages de dents.

Pour elle ce fut l’enfer, elle farda sa langueur, elle s’étiolait du manque, n’osait même plus penser, de peur qu’il l’entendît. Elle augmenta peu à peu le concombre.

Seul demeurait sans réserve l’extraordinaire plaisir qu’elle éprouvait à lui préparer, chaque jeudi, le plat qu’il préférait : une andouillette de loup mille-fleurs.

Louis René, lui, se mit à lire énormément, seul dans sa bibliothèque anglaise. Evanescent, d’humeur chagrine, aussi figé et muet que le marronnier reflété par la carrosserie de sa Dodge bordeaux parquée lustrée devant le perron de leur demeure. Qui aurait vu sa face mélancoliquement sèche aurait été tenté de lui porter secours, par crainte d’un décès prochain certain. Or ce n’était que le stigmate d’un foie paresseux doublé d’acrimonie persistante, qu’il cultivait avec soin et grandeur.

Jusqu’à ce jour, jeudi, andouillette de loup mille-fleurs.

 

Enveloppez chaque andouillette d’aluminium beurré. Disposez dans un plat de terre. Mettez à cuire à four modéré.

 

Cannelle bouchonnée, bichonnée, se sustente en son box.

Dix minutes au bain, Louis René ablutionne soigneusement sa sueur chevaline puis, comme à son habitude, rejoint sa bibliothèque anglaise hebdomadairement cirée par la bonne Sylvette. Il parcourt de l’œil […]

 

 

 



Ce site a été créé avec Jimdo !

Jimdo permet à tout le monde de créer son site internet très facilement, même sans connaissance informatique particulière. Sélectionner un design, le personnaliser en quelques clics, ajouter différents contenus, et voilà !
Inscrivez-vous maintenant sur fr.jimdo.com et commencez tout de suite à créer votre site gratuitement.